samedi 2 juillet 2016

Charles : Une légende désormais...

Légende : Représentation (...) des exploits de quelqu'un et qui se conserve dans la mémoire collective (source : Larousse)



Sa vie s'est arrêtée officiellement le 23 juin. En fait, elle s'est arrêtée il y a une couple d'années, lorsque son coeur et les métastases l'ont forcé à faire le (douloureux) deuil de sa vie active et de ses passions...

La cérémonie d'adieu que son fils Christian a organisée aujourd'hui était empreinte de sobriété, de sérénité, d'amour, d'amitié... De beaux et tendres témoignages pour un homme qui ne laissait personne indifférent. Son fils m'a demandé de parler du Charles des Iles de la Madeleine; j'ai spontanément dit oui, quoique devant la page blanche, j'ai eu de la difficulté à résumer en quelques paragraphes les nombreux souvenirs que j'avais de lui. C'a donné ceci :

Je m'appelle Sylvie Bruneau et j'ai accepté de vous parler du Charles des Iles de la Madeleine parce que même s'il est de notoriété publique que Charles y a passé une trentaine d'étés, il semble qu'il n'était pas très bavard sur ce qu'il y faisait, sur ce qu'il y vivait. Je ne fais pas de planche à voile, mais j'ai passé beaucoup d'heures sur le banc, avec Charles, à admirer le beau spectacle des véliplanchistes sur la lagune du Havre-aux-Basques.

Fin des années '90, je me souviens de Charles comme d'un homme qui s'imposait dans le groupe. Le mâle alpha de la lagune. Sa compagne d'alors était l'une des plus belles, et il en était fier. Il avait la réputation de manoeuvrer des planches et des voiles surdimensionnées des heures durant. Il avait exploré et photographié tous les racoins des Iles, vu tant de couchers de soleil. Très tôt le matin, s'il ne foulait pas une plage de ce paradis, on pouvait le voir sur la Route 199 en patins à roues alignées ou en vélo. Comment il est entré dans notre vie, à Jacques, mon mari, et moi? Probablement parce qu'il fréquentait lui aussi le Parc de la Yamaska. Année après année, on le retrouvait avec plaisir, comme le reste de la belle gang. Charles et Jacques sont rapidement devenus complices. Les deux compères, adeptes du même style de planche, étaient inséparables.

Charles ne faisait pas de camping comme les autres planchistes. Il était le fidèle locataire estival de Jeanne d'Arc et Laurent qui lui cédaient leur grande maison à Havre-Aubert, et lorsqu'ils n'ont plus été en mesure de le faire, ils l'ont chaudement recommandé à une amie qui a finalement accepté de louer sa maison à ce monsieur tranquille et méticuleux. Et Charles savait soigner ses entrées chez ses hôtes qui, en retour, le gavaient de gâteries madeliniennes. Il en a mangé des pots-en-pot, du homard, des carrés aux dattes, des galettes. Et même les petits bleuets sauvages que je ramassais patiemment dans le champ de la lagune; il avait une façon bien à lui de me les soutirer...

En dépit de son franc parler et de ses commentaires quelquefois cinglants sur les gens, Charles était un véritable gentleman, prêtant sa chaise à une jeune maman, portant secours à une autre qui lui en sera toujours reconnaissante. Il avait la cote avec les filles.

Nous n'étions pas là lors de son dernier séjour aux Iles en 2014, mais on nous a dit qu'il n'avait déjà plus la force de faire de la planche à voile. Certains l'ont surpris en pleurs sur son banc. Quel deuil pour ce grand sportif qui, non sans déchirement, a posé le geste ultime de céder son équipement à une petite famille de planchistes passionnés. Un geste de renonciation, d'abdication face à sa condition, mais surtout de grande générosité.

Ces dernières années, la communauté des planchistes de la lagune a assisté impuissante aux ravages de sa maladie. Et pour qu'on ne l'oublie pas, elle a décidé de perpétuer son souvenir en apposant une plaque sur LE banc sur lequel Charles a passé son dernier été, le regard dirigé vers la lagune et ses voiles... Le banc Charles-Codère.


Charles, s'il y a un speed spot de l'autre côté, tu l'as sûrement trouvé et tu t'y rends tous les jours. Et j'oubliais de te dire : Sandra et Hugo, Sylvie et Simon, Denise et André, Marie-France et Gervais, Raoul et Françoise, Christiane et Claude, Jacinthe et Dany, Claude, Louis et Gilles, Linda et Alain, Karine et Jean-François, te saluent et parleront de toi longtemps.



C'est ça qui nous trouble, Jacques et moi...

Je vais attendre un peu avant d'enlever son nom de mes contacts... le temps de réaliser son départ...

1 commentaire:

Unknown a dit…

Merci Sylvie de ce si beau témoignage!
Comme je l'ai écrit dans un courriel: Charles a laissé son empreinte... sur les Îles!

Repose en paix... mon ami!